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Les Auteurs Nelson | ![]() |
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![]() | Le Nez d'un Notaire Edmond ABOUT 02/1913 SKELTON Joseph Ratcliffe | 015 |
![]() | Les Mariages de Paris Edmond ABOUT 12/1910 BARRIBAL William H. | ||
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![]() | Le Roi des montagnes. Edmond ABOUT 1ère édition : 1929 - xv, 206 p. illustré. Contient à peine plus de la moitié du texte original. abrégé par R H PARDOE |
Écrivain français, né à Dieuze (Meurthe) en 1828. En 1848, il remporta le prix d'honneur de philosophie, entra l'Ecole normale et fut envoyé en à l’école française d'Athènes. A son retour, il publia la Grèce contemporaine, où le peuple hellénique était traité avec beaucoup de sévérité. Le roman de Tolla qui parut ensuite dans la Revue des Deux-Mondes , souleva une polémique des plus vives dans laquelle on reprocha à l'auteur de s'être approprié un sujet et des idées qui ne lui appartenaient pas. Une comédie en trois actes Guillery d'un tissu fort léger, fut représentée peu de temps après au Théâtre-Français et n'eut aucun succès. Gaétana, jouée plus tard à l’Odéon souleva contre le jeune écrivain des haines violentes, dont l'explosion alla jusqu'au désordre. Le peu de succès de ces deux tentatives dut convaincre M. About que, s’il est un styliste de grand talent, la nature toute particulière de son esprit s'accommode peu aux exigences du théâtre actuel, où il ne faut que de l’action et une forte charpente.
Aujourd'hui le bagage littéraire de cet écrivain est déjà considérable. Outre les ouvrages cités plus haut, il a publié en feuilleton, en volume ou dans les revues, Les Mariages de Paris,-- Voyage à travers l’Exposition des Beaux-arts, -- Le Roi des Montagnes, --Germaine, -- Les échasses de Maître Pierre, --le Salon de 1857,--l’Homme à l’Oreille cassée, une de ses plus faibles productions,--Madelon , œuvre pleine d’esprit, mais où l’immoralité le dispute à l’invraisemblance--, etc... Mais celui de ses ouvrages qui lui créa les plus puissants ennemis est La Question romaine, livre qu’il publia après un séjour de quelques mois dans la capitale du monde chrétien, et où il fait ressortir avec beaucoup de malice et de vivacité les vices du pouvoir temporel.
Ce qui distingue le style de M. About, c’est l’esprit, la clarté, l’art de bien dire, et surtout une connaissance profonde et un grand respect de la langue qui sont un heureux reflet des brillantes études du lauréat de 1848. Ce sont ces qualités, sans doute, qui ont fait dire à ses partisans, et il y en a beaucoup, qu’il était une doublure de Voltaire. C’est déjà très flatteur, assurément, et nous ne contestons pas ce coté de son talent; nous ajouterons seulement que, s'il est la doublure de Voltaire, Il n'en a et n'en aura jamais l'étoffe.
Du reste, la place qu’occupe le nom de Voltaire dans les régions du génie est telle, qu'il peut y en avoir au-dessous de très éminentes. Nous espérons donc que cette restriction ne blessera pas les susceptibilités du jeune et spirituel écrivain. S'il devait en être autrement, l'expression serait allée au delà de la pensée.
Je ne puis faire entrer tous les romanciers dans les cases d'un système. Maintenant, je donnerai donc de courtes notes sur certaines personnalités qui se sont mises en dehors de la querelle des idéalistes et des naturalistes.
Je songe souvent à M. Edmond About avec étonnement. Sa carrière d'écrivain a été pleine de surprises. Il faut se rappeler ses débuts, dans les belles années de l'Empire. Il se révéla comme un polémiste de premier ordre, fin, spirituel, sceptique, ayant hérité, non pas peut-être comme on le disait de la canne de, Voltaire, mais tout au moins de sa badine. Son livre sur la Grèce, son livre sur Rome, bien qu'un peu vides en somme, eurent un succès considérable, grâce à là légèreté et à la belle humeur du sty1e. En outre, M. About débutait comme romancier avec beaucoup d'éclat. Ses Mariages de Paris, un recueil de nouvelles, eurent presque tout de suite dix à douze éditions. Il ne se reposait guère, il lançait coup sur coup Tolla , Germaine, Trente-et-quarante ; enfin, il faisait paraître Madelon, son meilleur roman selon moi, une étude de fille écrite avec une verve endiablée. Puis, après deux fantaisies qui furent très discutées: l'Homme à l'oreille cassée et le Cas de monsieur Guérin, il publiait un interminable roman en trois gros volumes : la Vieille Roche, où tout son talent se noyait et s'alourdissait. Et c'était fini, le romancier mourait brusquement en lui. Depuis cette œuvre, publiée il y a plus de dix ans, M. About, n'a pas, je crois, donné un seul livre à son éditeur. Le plongeon a été complet pendant plusieurs années.
On aurait pu croire qu'il était mort. Enfin il a pris la direction d'un journal, le XIX° siècle; il est aujourd'hui rédacteur en chef, faisant d'excellentes affaires d'argent,retrouvant parfois sa plume alerte des bons jours. N'importe, je ne connais pas de cas plus singulier dans notre littérature actuelle: un homme aux débuts si brillants, un écrivain dont les qualités maîtresses étaient l'activité et la fécondité, et qui tout d'un coup se retire de la production, comme s'il était vidé et qu'il n'eût désormais plus rien à dire. J'ai cherché l'explication du fait, je crois pouvoir affirmer que le grand malheur de M. About a été de ne croire à rien, pas même à la littérature. Ils étaient, en son temps, un petit groupe à l'École normale, qui affectait de se prendre d'une belle passion pour Voltaire. Le pis a été que certains ont dû rêver de recommencer la besogne de Voltaire. M. About, par exemple, a voulu être polémiste, pamphlétaire, conteur, philosophe, économiste. Seulement, les temps ont changé, la besogne de Voltaire ne saurait se reprendre dans les mêmes conditions. Ajoutez que le scepticisme était de rigueur. Un jour, M. About a dû se demander: « A quoi bon? » Il n'était pas convaincu, il n'avait pour lui que son esprit, déjà blasé sur toutes les batailles et sur toutes les victoires. Autant se tenir tranquil1e chez soi et vivre de ses rentes.
En outre, l'époque politique devenait obscure ; impossible de deviner où allait être l'avenir certain. M. About, de tendances libérales, s'était fait le commensal et l'ami du prince Napoléon, à tout hasard. Dans la tempête de 1870, il a disparu. Actuellement, il a reparu républicain. Mais si le polémiste est ressuscité, vieilli et un peu fourbu, le romancier semble être resté pour jamais dans la bagarre. On peut le juger d'une façon définitive. C'était plutôt un conteur. On sentait trop qu'il ne croyait pas à ses personnages; il les faisait danser au bout de sa plume, pour s'amuser lui-même et amuser les autres. Toujours l'auteur était derrière la page qui se moquait. Ce manque de conviction donnait beaucoup de légèreté à l'œuvre, mais lui enlevait tous les côtés profonds. L'analyse restait superficielle, l'œuvre n'était que facile et plaisante.
M. About ne laissera pas un type, pas une page forte et définitive. Il a été l'imprévu, un conteur qui s'est éveillé un matin plein d'esprit, qui a égayé un instant l'honorable société, puis qui, en se couchant le soir, a soufflé sa bougie pour toujours.